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INTERVIEW LE POINT - Robin Reda : « Consultons les Français sur l’immigration par référendum »

INTERVIEW. Inquiet des progrès du RN, le député macroniste, ex-LR, propose d’inscrire dans la Constitution la possibilité de réguler les flux migratoires. Publié le 17/04/2023 à 08h00

Après les semaines de mobilisation qui ont marqué le débat sur les retraites, le député Renaissance Robin Reda, issu des Républicains (qu'il a quittés en mai 2022), appelle le président et la majorité à ne pas mettre les questions régaliennes sous le tapis.

Alors que le projet de loi sur l'immigration préparé par Gérald Darmanin est pour l'heure reporté sine die et pourrait être découpé en plusieurs textes de loi, l'élu de l'Essonne, proche de Valérie Pécresse, préconise de consulter les Français par référendum pour inscrire dans la Constitution la possibilité de réguler les flux migratoires. Au risque, sinon, alerte-t-il, d'ouvrir un boulevard aux extrêmes à quatre ans de l'élection présidentielle de 2027.


Le Point : Le projet de loi Darmanin sur l'immigration est reporté sine die. Les questions régaliennes sont-elles l'angle mort de la macronie ?

Robin Reda : Le président est tout à fait conscient des enjeux et de l'anxiété des Français sur les questions d'autorité. Mais, dans le moment politique que nous traversons, la majorité aussi doit être capable d'entendre cette inquiétude sur la capacité du pays à préserver son modèle social et culturel. Le moment est venu de ne plus être craintif sur ces sujets !

Nous devons continuer à tenir le fil rouge du macronisme sur l'émancipation, tout en répondant à la très forte demande de protection des Français. Ils ont besoin de sentir qu'ils reprennent le contrôle. Or l'équation électorale de la prochaine élection présidentielle nous oblige à trouver des solutions si on ne veut pas être balayés par les solutions du pire, celles de l'extrême droite.


Le Point : On en est loin ! Le texte de Darmanin sera, au mieux, saucissonné en deux et la droite ne vous soutient pas…


Je propose donc que l'on consulte les Français par référendum, plutôt que de donner le sentiment qu'on chercherait le plus petit dénominateur commun pour convaincre la droite sans brusquer la gauche sur ce sujet qui nécessite, au contraire, fermeté et clarté. Inscrivons dans notre Constitution un grand principe, sorte de clé de voûte institutionnelle, qui permettrait à la France de réguler le nombre d'étrangers qu'elle accueille chaque année sur son sol. Cette clé de voûte serait d'abord soumise au vote des deux chambres du Parlement. Je suis convaincu que nous pouvons trouver une majorité à l'Assemblée, des Républicains jusqu'à certains élus communistes, si j'en crois les récentes déclarations de Fabien Roussel sur les « frontières passoires ». Au Sénat, le sujet fait consensus. Une fois adopté au Parlement, ce grand principe serait soumis aux Français par référendum pour l'inscrire dans la Constitution. Il faut un grand moment démocratique qui permette aux électeurs de s'exprimer pour qu'ils n'aient pas le sentiment d'être les grands oubliés de cette question qui les inquiète massivement. Le Point : Durant la primaire de la droite en 2021, Michel Barnier avait proposé un référendum pour suspendre le droit européen et instaurer un moratoire sur l'immigration… Le grand principe que je propose serait un outil juridique tout aussi puissant pour nous prémunir contre certaines aberrations et des excès de juridisme, car nous sommes parfois montrés du doigt quand nous voulons maîtriser nos frontières. Ça pourrait être très utile d'avoir un verrou constitutionnel face aux excès de recours et de jurisprudence, bien sûr dans le respect de nos engagements européens. Un pays comme le Danemark a parfaitement réussi à trouver un consensus politique sur cette question. On peut être fermes et humains, efficaces et rapides dans les décisions en matière d'immigration.


L'adage dit que les Français ne répondent jamais à la question posée lors d'un référendum, mais à celui qui la pose. Ne courez-vous pas tout droit à l'échec ? Nous avons trop pris l'habitude de faire des référendums de gestion et pas de vision. Et un référendum qui donne plus de souveraineté n'a jamais été perdu. J'entends ce réflexe pavlovien qui consiste à penser que tout référendum est perdu d'avance, mais nous ne sommes pas obligés de nous perdre dans des arguties juridiques, il faut une question simple.


Je propose qu'on engage des travaux préparatoires au Parlement – pourquoi pas une convention citoyenne ? – pour réfléchir à la question posée. Une majorité peut se dégager au Parlement et dans la population autour de ce grand principe. C'est une question qui transcende les clivages et les préjugés : même dans l'électorat de gauche, il y a une attente très forte d'autorité et de reprendre le contrôle.


Le Point : Une fois ce grand principe gravé dans le marbre de la Constitution, qu'est-ce qui changerait concrètement ?


Cela nous permettrait d'adopter des textes, par voie réglementaire ou législative. Je pense en particulier à une loi de programmation sur l'immigration qui autoriserait le Parlement à fixer chaque année des quotas, que ce soit par pays d'origine ou métier en tension. Dans la situation économique que nous connaissons, nous devons reconnaître que nous avons un problème de flux migratoires qui ne va pas aller en s'amenuisant.

Nous devons donner la priorité à l'intégration plutôt qu'à l'accueil, réduire les flux et lutter contre l'intégration ratée. Il faut tout mettre en œuvre pour annihiler les raisons de voter pour l'extrême droite dans quatre ans. Nous avons le devoir de proposer des solutions. On n'affaiblira pas le Rassemblement national avec des anathèmes, mais avec des antidotes. Et ça ne s'arrête pas au sujet migratoire. Je pense aussi au plan de lutte contre la fraude porté par le ministre des Comptes publics, Gabriel Attal, ou au réinvestissement dans l'école et la santé, dont le président fait sa grande priorité.


Le Point : Quel regard portez-vous sur votre ancienne famille politique ? Que dites-vous à vos anciens amis de LR ? Faites comme moi, rejoignez la majorité ?


Les Républicains ont des atouts à faire valoir pour le pays, à commencer par leur lucidité sur les questions d'autorité et leur ancrage local, mais tout cela n'est pas immuable. Bon nombre de leurs électeurs ont déjà glissé vers le président et les partis de la majorité. L'intérêt du pays est de ne pas basculer en 2027 entre les mains des extrêmes et LR n'est pas en posture aujourd'hui d'être l'alternative.

Personne ne lui demande véritablement de rejoindre la majorité – ce débat a encore besoin de mûrir –, mais il n'est jamais trop tard pour faire preuve de cohérence à droite. Quant à notre majorité, elle aussi doit faire un pas dans la compréhension des inquiétudes et des attentes des Français.


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